Chapitre 4 : La résurrection de Kel'Thuzad et le retour des Ténèbres

((Plusieurs semaines passent, durant lesquelles Arthas prépare les prochaines actions avec ses plus fidèles conseillers. Alors qu’il est penché sur une carte de Numenor, un chevalier de la mort entre dans la pièce))
Le chevalier : Seigneur, je suis Thalanar, à votre service. Les troupes sont prêtes pour le départ, comme vous l’avez ordonné. Et comme vous l’avez discuté avec le Seigneur Mal’Ganis, nous allons devoir faire un détour par Dragonia afin de récupérer un réceptacle capable de transporter les restes de Kel’Thuzad
Arthas : Un réceptacle fabriqué ici ne ferait pas l’affaire ? Avec la saronite…
Thalanar : Mal’Ganis a insisté pour que ce soit un réceptacle forgé de la main des forgerons du Vol Violet
Arthas : Je vois… Très bien, il doit avoir ses raisons pour perdre du temps. Je veux que l’armée se regroupe déjà au sud des Bois des Chants Éternels, le temps que j’arrive. Je me rends à Dragonia avec quelques soldats
Thalanar : Mal’Ganis m’a demandé de vous dire que vous trouverez le réceptacle au cimetière
Arthas : Hum, au cimetière ? Il veut que je devienne un pilleur de tombes en prime ?
Thalanar : Ce sera une surprise, c’est certain
Arthas : Je me mets en route sans tarder. Préviens les commandants de ne pas bouger tant que je ne serais pas arrivé
Thalanar : Il en sera fait selon votre volonté
((Il s’incline devant l’ancien prince de Dragonia, qui porte lui-même à présent une armure sombre ornée de crânes. Dans son dos dépasse la garde d’Éclat de l’Ombre. Ses cheveux autrefois dorés sont à présent d’un blanc osseux, et les rides apparus sur son visage creux, comme s’il était lui-même un mort-vivant… Enroulant la carte, il la place dans sa sacoche avant de quitter la pièce.
Avec une petite troupe de guerriers assouvis à ses désirs, Arthas quitte le Royaume des Ténèbres pour gagner Dragonia. Pour sa surprise, retourner sur sa terre natale ne lui procure aucun sentiment pénible, seule sa mission compte.
Ne cherchant pas à provoquer ou attirer l’attention, le dragon se rend immédiatement au cimetière au sud-ouest de la ville. Il y atterrit non loin du sentier principal, avant reprendre forme humaine et passer le portail.
Le silence l’accueille, mais celui-ci est vite interrompu par plusieurs voix, dont une que le prince déchu reconnait immédiatement. Leur route se croise alors, et les jadis mentor et élève se dévisagent. Le regard d’Uther passe immédiatement de la surprise à la fureur))
Uther : Tiens, tiens, le chien revient contempler son œuvre. J’ai prié pour que tu restes au loin
Arthas : Je suis un mauvais limier, je reviens sans cesse sur mes pas. Je vois que tu te fais toujours passer pour un paladin, même si j’ai dissous l’ordre
Uther : Comme si tu pouvais le dissoudre de toi-même. Je ne rends de compte qu’à la Lumière, mon garçon, comme c’était ton cas autrefois. Ton père a régné sur ce pays pendant près de cinq-cent ans, et tu l’as réduit en cendre en quelques jours. Mais la destruction et la ruine sont aisées, n’est-ce pas ?
Arthas : Très théâtral, Uther. Aussi plaisants soient-ils, je n’ai pas le temps pour les souvenirs. Je suis venu pour l’urne. Donne-la-moi, et je ferai en sorte que ta mort soit rapide
Uther : L’urne contient les cendres de ton père, Arthas ! Quoi, tu espérais les profaner une dernière fois avant de laisser le royaume mourir ?
Arthas : Père… J’ignorais ce qu’elle contenait… Mais cela n’a pas d’importance, je vais récupérer l’objet d’une façon ou d’une autre !
Uther : Et dire que j’ai promis à ton père de veiller sur toi !
Arthas : Ce fut ta dernière promesse !
((Il tire Ellemayne et dévisage le Porteur de la Lumière, qui confie l’urne à un des paladins avant de s’armer de son marteau. Tous deux se jaugent alors…
Uther se jette sur lui, mais Arthas bondit juste à temps sur le côté comme il l’avait appris à l’époque en suivant les entrainements du paladin. Il sent le souffle caresser son visage tandis que le coup le manque. Les traits d’Uther sont calmes, concentrés… et implacables. Il est de son devoir, selon lui, de tuer le fils félon, et d’arrêter la propagation du mal.
Tout comme Arthas sait qu’il était de son devoir de tuer l’homme qui l’avait un jour formé. Il doit détruire son passé… tout son passé. Ou alors il courra toujours après le traitreusement doux espoir de compassion et de pardon. Dans un cri incohérent, Arthas rabaisse Ellemayne.
Le marteau d’Uther le bloque. Les deux hommes se tendent, leurs visages à quelques centimètres l’un de l’autre, les muscles de leurs bras tremblent sous l’effort, jusqu’à ce qu’avec un grognement, Uther projette Arthas en arrière. Le cadet trébuche. Uther appuie ses attaques. Son visage est calme, mais ses yeux sont acharnés et résolus. Sa confiance absolue choque Arthas. Ses propres coups sont puissants, mais irréguliers. Il n’a encore jamais été capable de vaincre Uther))
Uther : C’est ici que ça s’arrête, mon garçon ! Pour la justice de la Lumière !
((Tout à coup, à la grande horreur d’Arthas, le paladin est entouré d’une lumière brillante, éclatante. Pas seulement son marteau, mais son corps entier, comme s’il était lui-même la véritable arme que la Lumière utilisait pour abattre Arthas.
Le marteau s’abat. Tout l’air est chassé des poumons d’Arthas d’un seul coup quand l’arme frappe droit sur son abdomen. Seule son armure le sauve, et même celle-ci est froissée par le puissant marteau lumineux manié par le saint paladin rayonnant. Arthas s’étale, Ellemayne propulsée hors de sa main, une douleur atroce le traversant tandis qu’il lutte pour respirer, lutte pour se relever. La Lumière, il lui avait tourné le dos, l’avait trahie. Et maintenant elle exigeait qu’il soit châtié à travers Uther le Porteur de Lumière, son plus grand champion, insufflant dans son ancien professeur la pureté de son éclat et de ses desseins.
La lueur enveloppant Uther s’accrut, et Arthas grimace de douleur tandis que la Lumière dessèche ses yeux aussi bien que son âme. Il a eu tort de l’abandonner, tellement fort, et désormais sa pitié et son amour sont transformés en cet être rayonnant, implacable. Il lève le regard sur la lumière blanche que sont devenus les yeux d’Uther, des larmes embuant les siens tandis qu’il attend le coup de grâce.
S’est-il saisi de l’épée sans s’en rendre compte, ou avait-elle bondi dans ses mains de son propre chef ? En cet instant déstabilisant, tourbillonnant, Arthas ne peut le dire. Tout ce qu’il sait, c’est que tout d’un coup, ses mains se referment sur la garde d’Éclat de l’Ombre, et que la voix de celle-ci résonne dans son esprit.
Toute Lumière a son Ombre, chaque jour a sa nuit, et même la plus brillante des chandelles peut être soufflée. Ainsi que la plus brillante des vies.
Il prend une profonde inspiration, emplissant ses poumons d’air, et pendant un instant, Arthas voit la Lumière enveloppant Uther vaciller. Puis Uther lève à nouveau son marteau, prêt pour le coup de grâce… Mais Arthas n’est plus là.
Si Uther était un ours, énorme et puissant, Arthas était un tigre, agile et rapide. Le marteau, aussi fort et béni par la Lumière qu’il soit ou que ce soit son propre porteur, n’est pas une arme rapide, pas plus que ne l’est le style de combat d’Uther. Ellemayne, cependant, bien qu’étant une énorme lame runique à deux mains, semble presque capable de se battre d’elle-même.
Il s’avance à nouveau, cette fois sans hésitation, et commence à se battre pour de bon. Il ne fait pas de quartier quand il attaque Uther le Porteur de Lumière, ne lui offre aucun moment pour reprendre son souffle, ramener en arrière son arme et l’écraser à nouveau. Les yeux d’Uther s’écarquillent de surprise, puis se plissent de détermination. Mais la Lumière qui a auparavant si brillamment déferlé de sa puissante silhouette diminue à chaque seconde qui passe. Diminue face au pouvoir qu’offre Chaos à Arthas.
Ellemayne touche encore et encore à la tête brillante du marteau, à sa poignée, à l’épaule d’Uther, dans cet espace étroit entre l’épaulière et le hausse-col, tranchant profondément.
Uther gronde et chancèle. Du sang se déverse de sa blessure. Éclat de l’Ombre en désire plus, et Arthas veut le lui donner.
Grondant comme une bête, ses cheveux blancs volant, il porte une attaque appuyée. Le marteau, puissant et brillant, tombe alors de ses doigts affaiblis quand Ellemayne tranche presque le bras. Un coup cabosse le pectoral d’Uther, un second au même endroit, le fend et déchire la chair en-dessous. Le tabard d’Uther, pourpre et doré aux couleurs de Dragonia, pour qui il s’est autrefois battu, voltige en morceaux jusqu’à terre quand Uther le Porteur de Lumière tombe à genoux. Il lève le regard. Il respire avec difficulté. Du sang ruisselle de sa bouche, suintant dans sa barbe, mais il n’y a pas une seule trace de reddition sur son visage))
Uther : J’espère avec tendresse qu’il y a une place spéciale en enfer qui t’attend, Arthas
Arthas : Il se peut que nous ne le sachions jamais, Uther
((Il lève Ellemayne pour le coup de grâce. L’épée chante presque d’impatience))
Arthas : Je compte bien vivre éternellement
((Il abat la lame runique en ligne droite, à travers la gorge d’Uther, bâillonnant ses propos de défi, perçant son grand cœur. Uther meurt presque sur le coup. Arthas libère sa lame et recule d’un pas, tremblant. C’est certainement dû au relâchement de la tension et à son exaltation.
Une fois ses serviteurs les autres paladins tués, Arthas s’agenouille et ramasse l’urne près d’un cadavre. Il la tient pendant un long moment, puis brise lentement le sceau et renverse la jarre, répandant son contenu. Les cendres de Feolthanos tombent comme une pluie grisâtre, comme de la farine. D’un seul coup, le vent tourne. La poudre grise qui est tout ce qu’il reste d’un Aspect, s’envole soudainement, comme si elle était animée, tourbillonnant pour arroser le chevalier de la mort. Surpris, Arthas recule d’un pas. Un automatisme lui fait lever les mains pour se protéger le visage, et il lâche l’urne, qui atterrit au sol avec un bruit mat. Il ferme les yeux et se détourne, mais pas assez rapidement, et il commence à tousser, les cendres âcre l’étouffant. Brusquement, il est pris de panique. Il lève des mains gantées pour s’essuyer le visage, essayant de nettoyer la fine poudre qui lui remplit la gorge et le nez et lui pique les yeux. Il crache, et un instant son estomac se soulève. Arthas prend une profonde inspiration et se force à se calmer. Un instant plus tard, il se relève, à nouveau serein. S’il ressent quoi que ce soit, il l’a ravalé si profondément qu’il l’ignore. Le visage de marbre, il retourne vers ses serviteurs qui transportent les restes de Kel’Thuzad))
Arthas : Mettez les restes de Kel’Thuzad là-dedans et partons pour Quel’Thalas
((Laissant le carnage derrière lui, le prince quitte alors Dragonia avec sa petite troupe en direction du Royaume d’Ethernia où se situe la grande ville des haut-elfes et l’île de Quel’Danas, abritant le Puits de Soleil…))

((Le reste de la vaste armée de morts et fidèles rejoint, l’ordre de départ est donné et les centaines de créatures de l’Ombre, cadavres et vivants se mettent en avant. Partout où cette masse de soldats passe, la terre flétrie et fait apparaitre ce qu’on appellera par la suite la ‘’Malebrèche’’. La végétation meurt littéralement sous les pieds des ‘’morts’’.
Les portes de Lune d’Argent atteintes, Arthas fait s’arrêter ses troupes pour constater qu’ils ne disposent pas de l’effet de surprise. Ils sont déjà attendus… Sur l’un des remparts, une ‘’elfe’’ bien connue par le prince, portant une robe blanche étincelante, s’exprime, tandis que derrière elle, de nombreux archers sont prêts à lâcher leurs flèches))
Saphira : Vous n’êtes pas les bienvenus ici !
Arthas : Oh Saphira, quelle surprise. Si je m’attendais à te voir ici
Saphira : J’ai eu vent de tes plans, et je viens t’arrêter, traitre ! Tu as assez fait !
Arthas : Ainsi, Spirit t’envoie te sacrifier pendant que lui ne daigne pas bouger
Saphira : Spirit n’est pas au courant… Il a bien assez à faire suite à tes actions à Dragonia !
Arthas : Tu aurais mieux fait de rester à Dragonia à ses côtés, plutôt que de mourir ici bêtement
Sylvanas : Faites ce que vous pouvez faire de pire ! La muraille elfique protégera notre royaume. Nous ne les laisserons pas approcher la ville, parole de Forestier ! Pour Quel’Thalas !
Arthas : Au combat, mes troupes ! Massacrez-les tous afin qu’ils puissent me servir, moi et le Seigneur !
((La générale des Forestiers bande son arc, le signal de l’attaque. Un instant plus tard, l’air est empli du vrombissement soudain de douzaines de flèches en vol. Saphira, ayant fait apparaitre un arc par magie, cible le prince déchu, et sa visée n’est pas à envier aux elfes. La flèche chante tandis qu’elle accélère vers la tête nue d’Arthas. Mais un instant avant qu’elle ne frappe, elle voit un éclair blanc-bleuté.
Sylvanas braque son regard. Plus rapidement qu’elle ne peut l’appréhender. Arthas avait relevé son épée, ses runes émettant cette froide lueur blanche bleutée, et coupé la flèche en deux. Il lui sourit et lui fait un clin d’œil, ce qui fait grogner les deux femmes.
Les troupes ennemies, tantôt composées de cadavres assouvis, tantôt de vivants ayant juré fidélité aux Ténèbres, font penser les deux femmes à une nuée d’insectes tandis qu’ils convergent, parfaitement coordonnés dans leur harmonie décérébrée, sur les forestiers. Les archers avaient leurs ordres, abattre en premier les vivants, et puis éliminer les morts avec des flèches embrasées. La première volée de flèches abat presque chacun des sectateurs. La seconde darde les cadavres ambulants de douzaines de flèches enflammées. Mais même alors qu’ils s’effondrent, certains presque aussi secs que de l’amadou, les autres pleins de sang, la puissance brute de leur nombre commence à faire tourner l’issue de la bataille.
D’abord confiants en la victoire, les choses se mettent à rapidement tourner en défaveur des elfes. Pour une raison qu’ils ignorent, leur Barrière magique tombe peu après, ce qui permet aux troupes ennemies d’escalader les remparts et tirer des projectiles sur les défenseurs. Il s’est plus tard avéré qu’un traitre a permis à l’ennemi d’entrer si facilement. Les haut-elfes n’ont pas le choix face à cet échec…))
Sylvanas : La muraille va tomber, repliez-vous !
Arthas : En avant, vers la victoire !
((La générale des Forestiers et la dragonne bleue bandent leur arc et tirent, bandent et tirent, presque plus rapidement qu’elles ne le pensent, se concentrant sur leur volonté de défendre la cité. Du coin de l’œil, elles voient des créatures ailées cueillir des archers depuis les remparts et les jeter dans le vide, les tuant à coup sûr avec la chute. Même en les abattant dans les airs, leur proie connaitrait un sort funeste au vu de la hauteur. Silencieuse et en peine, Sylvanas ne peut que regarder les siens se faire massacrer… Un grognement profond venant de près d’elle attire alors son attention. Il s’agit de Saphira, qui bondit du rempart avec comme but de s’approcher d’Arthas))
Saphira : Arrête-toi, monstre !
Arthas : Tu veux m’arrêter ? Toi ? Tu n’es qu’une simple dragonne !
Saphira : Tu penses que je ne vaux rien ? Apparemment tu n’as jamais combattu de dragonne avant, tu vas le regretter
Arthas : Tu commences à m’ennuyer considérablement, Saphira
La voix de Chaos : (Oui, t’ennuyer. Te tourmenter comme le moineau le fait au faucon. Mais tu n’as pas à te laisser faire, tu disposes de la puissance. Massacre-la et transforme-la en serviteur, elle pourrait t’être utile !)
Arthas : Finissons-en !
((Arthas attaque avec son épée maudite, et même si Saphira impressionne par ses talents de bretteuse, elle perd rapidement ses forces.
Elle n’a pas de quoi l’arrêter. À vrai dire, elle avait peu d’espoir de réussir, et cette pensée se propage autour d’elle. La sueur se forme sur son visage, ses muscles crient de fatigue, et cependant, la dragonne bleue continue de combattre. Elle tourbillonne, se retourne et poignarde dans le vide, car son adversaire est bien rapide compte tenu le poids de son armure.
Saphira affronte la lame mortelle, la frappant de ses propres armes qui se fracassent à l’impact. Et puis la lame runique la transperce. Froide, elle est si froide, la découpant comme si elle était elle-même faite de glace.
Arthas se penche sur elle, leurs regards croisés. Saphira tousse, de fines gouttelettes de sang éclaboussant son visage angélique. Est-ce son imagination, ou y a-t-il un soupçon de regret sur son visage… ?
Il retire alors son épée et elle tombe, du sang jaillissant de son corps. Saphira frissonne sur le sol de pierre froide, le mouvement faisant jaillir une douleur atroce à travers son corps. Elle pose une main sur la plaie béante de son abdomen, comme si ses mains pouvaient la refermer et mettre fin à ce torrent))
Saphira : Achève ton œuvre, je mérite… Une mort rapide
Arthas : Après tout ce que tu m’as fait endurer, dragonne, reposer en paix est bien la dernière chose que je t’accorderai
Saphira : Non, tu n’oserais pas…
Arthas : Je vais capturer ton âme et la tourmenter autant que je le voudrai
Thalanar : Seigneur ! Une brèche est ouverte ! Nous pouvons aller au puits pour ressusciter Kel’Thuzad
Arthas : Bien, mais avant…
((Usant du pouvoir d’Éclat de l’Ombre, il relève les elfes tombés au combat et transforme la générale des Forestiers, Sylvanas en Banshee. Il se tourne ensuite vers Saphira, un sourire cruel aux lèvres.
Une douleur atroce la traverse, une douleur comme elle n’en a jamais connue, et Saphira sait instantanément qu’aucune douleur physique ne pourrait rivaliser avec ce tourment. C’est une douleur frappant l’esprit, la douleur de son âme quittant son corps sans vie pour être emprisonnée. La douleur d’une… déchirure, d’une mise en pièce, d’un siphonage depuis le sanctuaire chaud du silence et du repos. La violence de l’acte s’ajoute à l’exquis tourment, et Saphira sent un cri sourd forcer le passage du plus profond de son corps, traversant ses lèvres qu’elle savait ne plus être physiques. Une profonde mélopée funèbre qui n’est pas seulement la sienne propre, qui glace le sang et arrête les cœurs
Les ténèbres quittent son champ de vision, mais les couleurs ne reviennent pas. Elle n’en a cependant pas besoin pour voir son bourreau, il est de toute façon blanc, noir et gris dans un monde coloré. La lame runique qui lui a pris la vie, qui a pris et consommé son âme, scintille et luit, et la main libre d’Arthas est levée dans un geste d’appel tandis qu’il l’arrache à l’étreinte apaisante de la mort. L’unique pensée qui traverse Saphira est Spirit. Elle est désolée de l’abandonner… Dans un geste horizontal, Arthas fait disparaitre le spectre de Saphira avant de se tourner vers la banshee qu’est devenue la générale des Forestiers))
Arthas : Tes forestiers serviront tout aussi bien, vous êtes désormais mon armée. Il n’était pas nécessaire qu’il en soit ainsi. Sache que ton destin, le leur, et celui de ton peuple découlent de tes choix. Mais je dois me hâter vers le Puits de Soleil, et tu vas m’y conduire
((Avec un spectre asservi à ses côtés, Arthas et son armée continuent leur chemin vers l’île de Quel’Danas. Jusqu’à arriver face à la mer… Silencieux, le prince déchu évalue le niveau de mer, lorsque la voix amusée de Sylvanas retentit))
Sylvanas : Tu ne peux pas remplir ce canal avec des cadavres, Arthas. La cité entière n’y suffirait pas. Tu t’arrêtes là, et ta défaite m’est douce
Arthas : Haha. Tu oublies que je possède des ailes. Je peux atteindre n’importe quoi si je le veux. Mais pour toi, je vais user d’un autre moyen…
((Il jette alors Ellemayne vers la rive, l’observant presque ravi tandis qu’elle tourbillonne pour s’empaler, la pointe la première, dans le sable. La voix de l’épée, de Chaos, émane de l’arme impie avant que, sous les yeux ébahis et choqués de Sylvanas, l’eau clapotant contre sa lame incrustée de runes ne commence à se changer en glace. Une glace que ses armes de siège et ses guerriers peuvent traverser.
La terre ferme atteinte, les gardes du Puits qui tentent de le défendre se font décapiter par les troupes du prince, et Arthas les oblige par la suite de participer au massacre des leurs encore vivants. Pendant qu’ils se frayent un chemin à travers les derniers elfes déterminés, Arthas est pris dans un duel contre le roi Anasterian Haut-Soleil.
Même si l’elfe possède une puissante arme et un bâton avec un puissant cristal, l’issue du combat tourne vite en sa défaveur. L’épée Felo’melorn n’est pas de taille face à Ellemayne. Elle se brise net quand les lames s’entrechoquent, les morceaux brisés tourbillonnant au loin quand Anasterian succombe, son âme arrachée et dévorée par la luisante Éclat de l’Ombre, comme l’ont été tant d’autres.
Le Haut-roi s’étale sur la glace, avachi, son sang formant une flaque sous lui, ses cheveux blancs étalés comme un suaire, tandis qu’Arthas regarde triomphalement autour de lui. Et Sylvanas, bien qu’elle sache que cela va blesser ceux qu’elle aime encore, ne peut porter le poids de la douleur, de l’angoisse et de la haine pure et ardente qu’elle éprouve envers Arthas et tout ce qu’il a fait. Sa bouche s’ouvre, et un cri magnifique et terrible à la foi déchire sa gorge éthérée.
Son cri agit comme une onde de choc, renversant les elfes encore debout, qui se protègent les oreilles en affichant des regards de peine. Même Arthas braque le regard sur elle pendant un instant, ses sourcils blancs se rejoignant tandis qu’il l’évalue. Elle voulait s’arrêter, se taire, étouffer ce cri de destruction qui ne faisait que servir celui qu’elle haït. Enfin, il s’épuise petit à petit à force de douleur, et Sylvanas, banshee, fait silence, dégoutée, pour voir son bourreau lui sourire de plus belle))
Arthas : Quelle belle arme tu fais. J’ai bien fait de t’embarquer. Peuple de Quel’Thalas ! Je vous ai donné de généreuses opportunités de vous rendre, mais vous avez obstinément refusé. Sachez qu’aujourd'hui, votre race entière et votre antique héritage vont disparaitre ! La mort elle-même est venue prendre possession de la haute terre des elfes ! Même votre dirigeant, Anasterian, est mort sous les coups de mes soldats. Et nous allons en finir maintenant ! En avant mes fidèles !
((L’horrible armée avance. Arthas atteint enfin le plateau. Il l’atteint et y massacre les elfes représentant le dernier repart entre le Puits et lui. Et alors, il inflige l’ultime horreur au peuple elfe, marchant vers le splendide bassin éclatant qui a soutenu les quel’dorei pendant des millénaires. À ses côtés l’attendant, se tient une silhouette que reconnait Sylvanas, Dar’Khan Drathir, ami et à présent traitre de la patrie. C’est donc lui qui a trahi Quel’Thalas. Celui qui, bien plus qu’Arthas, avait le sang de milliers d’entre eux sur ses mains. Celui qui a fait tomber les Barrières pour laisser l’ennemi progresser. Elle observe alors une lueur qu’elle sait dorée se réfléchir sur les traits d’Arthas, les adoucissant et lui prêtant une chaleur artificielle. Puis, il renverse dans l’eau le contenu d’une urne exquisément ciselée, et la lueur change. Elle commence à frémir et à tournoyer, et à l’intérieur du centre tourbillonnant de la lueur magique endommagée apparait une ombre…
Même après ce qu’elle a vu durant ce jour sombre, même après ce qu’elle est devenue, Sylvanas est abasourdie par ce qui émerge du Puits de Soleil souillé, se levant et tendant les bras vers le ciel. Un squelette cornu et ricanant, ses orbites flamboyantes. Des chaines serpentent autour de lui et des habits de cérémonie pourpre volent lors de ses déplacements))
Kel’Thuzad : Voici ma renaissance, comme promis ! Le dieu m’a accordé la vie éternelle !
((Tout cela pour ça ? Pour relever une simple entité ? Tout ce massacre, cette torture, cette terreur, l’indiciblement précieux et vital Puits de lumière corrompu, un mode de vie qui a perduré pendant des milliers d’années fracassé pour ça ? Elle observe fixement et dégoutée la liche gloussante, et la seule chose qui soulage quelque peu son agonie est de voir Dar’Khan, qui a tenté de trahir son nouveau maitre comme il a trahi son peuple, mourir, comme elle l’a fait, sur le fil aiguisé d’Ellemayne.
Son regard, et celui d’Arthas et Kel’Thuzad sont alors attirés vers un chevalier de la mort s’approchant))
Thalanar : Nous devons retourner au royaume pour préparer la prochaine étape
Arthas : Oui en route, rentrons chez nous. Tu n’es pas fâché que je t’ai tué autrefois ?
Kel’Thuzad : Ne sois pas stupide. Le Dieu des Ténèbres m’avait dit comment finirait notre rencontre
Arthas : Le Dieu des Ténèbres savait que je te tuerais ?
Kel’Thuzad : Bien sûr, il t’a choisi pour être son champion bien avant que le Fléau ne commence
Arthas : S’il est omniscient, alors comment les Seigneurs de l’Effroi le contrôlent-ils comme ils le font ?
Kel’Thuzad : Ils sont les agents de celui qui a créé notre maitre. Les fougueux agents de la Légion Ardente. C’est une vaste armée démoniaque qui a consumé d’innombrables mondes au-delà du nôtre. Désormais, elle vient pour embraser Numenor. Notre maitre a été créé pour ouvrir la voie pour son arrivée. Les Seigneurs de l’Effroi ont été envoyés pour être certains qu’il réussisse
Arthas : Donc l’affection à Dragonia, la citadelle du Royaume des Ténèbres, le massacre des elfes… Tout ça pour préparer une énorme invasion démoniaque ?
Kel’Thuzad : Oui. Tu finiras par découvrir que notre histoire entière a été modelée par le conflit à venir. Cette dernière phase du plan était de créer ce Fléau, et tuer tout groupe qui pourrait résister à l’arrivée de la Légion. La suite va bientôt débuter, la destruction de Dragonia puis des autres dragons. Allons-nous préparer. Mais par ordre de Mal’Ganis, tu n’y assisteras pas, tu iras t’occuper d’une autre tâche pendant ce temps
Arthas : Qu’à Dragonia à voir là-dedans ?
Kel’Thuzad : Eh bien, la résistance. Mais nous, nous allons chercher un livre à Dalaran pendant ce temps
Arthas : … Très bien
((Cette idée ne l’enchante guère, mais le prince déchu ne dit mot. Sur cela, ils regagnent l’extérieur pour constater que les elfes ont pour la plupart été vaincus et relevés en serviteurs. Toutes les troupes rassemblées, ils repartent ensuite pour les Terres Noires, à l’aide des mages et dragons présents dans les rangs, prêts à s’atteler à la suite de ses actions…))